Les hôtels dieux les hospices

Pour les "pauvres du Christ"

Un hôtel-Dieu au XV, s. On s'y attache à assurer autant le bien-être du corps que le salut de l'âme.

Mais on reste impuissant devant les maladies graves. Le contrôle des hôpitaux par les évêques fut toujours plus ou moins théorique. Un grand nombre d'entre eux leur échappaient, notamment ceux qui dépendaient des ordres religieux exempts. Mais l'autorité de tutelle, quelle qu'elle fût, s'efforçait de veiller à ce que chaque maison fût bien administrée. La gestion des petits hospices fut souvent confiée à un responsable nommé par le patron laïc ou ecclésiastique pour une durée déterminée, s'engageant sous serment à gouverner correctement la maison et à s'occuper des pauvres avec compassion, un inventaire du mobilier étant dressé à l'entrée et à la sortie de charge.

Mais dans bien des cas. la charge de diriger l'hôpital fut considérée comme un bénéfice ecclésiastique. Des abus s'introduisirent souvent dans un tel système: non résidence des titulaires, appropriation à des fins personnelles des revenus de la maison, manque de zèle...

Les plus hautes autorités de l'Église tentèrent de réagir mais, dans la plupart des cas, sans résultat réel.

En dehors des petits établissements, le personnel était composé de frères et de sueurs vivant en communauté selon des statuts inspirés des règles monastiques. L'orientation vers une plus grande régularité de vie du personnel soignant fut particulièrement affirmée dans les communautés de chanoines hospitaliers et dans de véritables ordres religieux à vocation hospitalière.

L'essentiel des ressources des hôpitaux médiévaux provenait de leur dotation initiale, accrue au fil des ans par les donations et les legs charitables des fidèles pour lesquels les malades, image souffrante du Christ, étaient des intercesseurs symboliques dans la perspective du salut. Constitué de biens fonciers et de maisons données en location, ce patrimoine fournissait aux établissements des revenus fixes, auxquels s'ajoutaient des ressources annexes plus aléatoires: produit des quêtes, offrandes consenties par de pieux visiteurs - d'autant plus importantes que des indulgences étaient parfois accordées par l'autorité ecclésiastique - vêtements, draps ou meubles donnés volontairement, ou prélevés sur les dépouilles des malades décédés à l'hôpital, ou encore confisqués sur les biens des condamnés.

Les temporels hospitaliers ont beaucoup souffert des crises de la fin du Moyen Âge : revenus en diminution, bâtiments endommagés ou détruits, tandis que les besoins se faisaient ressentir avec une acuité accrue. Beaucoup d'hôpitaux disparurent, leurs biens étant réunis à ceux des établissements qui avaient mieux résisté. Incapables de faire face à ces bouleversements, comme aux abus qui les accompagnaient, les administrateurs hospitaliers et leurs patrons ecclésiastiques durent peu à peu admettre l'ingérence des autorités municipales ou royales dans la gestion des maisons. La laïcisation de l'institution hospitalière débuta ainsi, dès le XVI s., notamment dans les pays méditerranéens.

Daniel Le Blévec, Professeur, Montpellier III HISTORIA MAGAZINE THÉMATIQUE Bibliothèque d'Arcachon